Emna Everard est la co-fondatrice de Kazidomi, un eshop qui « se donne pour mission de rendre un healthy lifestyle plus abordable à tous ».
Ayant compris dès son plus jeune âge la nécessité de se nourrir sainement et de prendre soin de soi, elle décide de développer son magasin au moment de ses études et se lance dès l’obtention de son diplôme dans cette aventure entrepreneuriale.
Convaincue par sa mission, poussée par sa persévérance, Emna a appris à bien s’entourer et à s’investir pleinement dans son projet, en accord avec ses idéaux, et en apprenant chaque jour à avancer du mieux possible.
Bonne lecture ! 🙂
Bonjour Emna, peux-tu te présenter et me raconter ton parcours ?
Je m’appelle Emna, je suis la co-fondatrice de Kazidomi. Je vais te raconter cette histoire, car elle ne s’est pas construite en un instant : c’est un projet auquel je pense depuis mon enfance ! Il y a même des vidéos dans lesquelles on me voit dire qu’un jour j’aurai mon magasin, dans lequel on pourra faire ses courses les yeux fermés, sans regarder les compositions. Je n’avais que 12 ans ! Mes deux parents sont médecins et mon père est spécialisé dans la nutrition et la médecine sportive, donc je prenais déjà des compléments alimentaires, et en faisant nos courses, on regardait toujours si les produits comportaient tel ou tel ingrédient. Il fallait toujours que la liste soit la plus courte possible, c’était devenu presque un jeu. Après, j’ai commencé mes études en école de commerce en ayant pour but final d’avoir le bagage nécessaire pour pouvoir ouvrir ce magasin. Puis, pendant mes études, je me suis passionnée pour ce qui était digital, l’IT, le codage, et j’ai commencé à remettre en question l’idée d’ouvrir un magasin physique, car c’était cher, avec des horizons différents. Je me suis donc dit qu’un site e-commerce serait beaucoup plus abordable. Je pouvais m’en sortir pour pas grand-chose, donc pendant mes études, j’ai profité de ma dernière année durant laquelle je devais écrire ma thèse pour faire un business plan, et j’ai demandé à ce qu’elle ne soit pas trop théorique pour construire un projet qui me serait utile plus tard. J’ai eu de la chance car ça a été accepté, ce qui n’est pas toujours facile. J’ai bossé toute ma dernière année sur ce business plan. Je n’étais pas seule, car mon compagnon qui n’était pas intéressé au départ s’est finalement dit qu’il pourrait m’aider. Ses cours étaient calmes, il avait du temps, et quand on se voyait je bossais tout le temps donc il en avait marre de me voir bosser et ne pas savoir quoi faire ! Il a donc fini par m’aider et en constituant la société on s’est dit pourquoi pas le faire ensemble ! Je débarquais, je n’avais jamais bossé dans une boîte, je présentais mon mémoire en business plan mais lui avait déjà commencé donc, pendant quelques mois, on l’a monté ensemble. On a lancé la première version du site en ligne et en décembre il a démissionné après deux ans de travail dans le conseil. Aujourd’hui, nous gérons donc ce projet à deux en couple. Ça se passe super bien, je pense que j’ai de la chance car ça pourrait ne pas bien se passer bien si ce n’était pas lui. On est hyper complémentaires, autant dans les compétences que nos personnalités, et on est alignés aussi. Ça fait 6 ans qu’on se connaît, nos conversations sont directes, on ne perd pas de temps, donc c’est chouette. On ne passe pas beaucoup de temps au bureau ensemble car on ne bosse pas sur les mêmes parties donc le soir ses journées m’intéressent beaucoup plus qu’avant, j’ai envie de savoir ce qu’il a fait, et c’est la même chose pour lui. En fait, ça fait partie de nos vies et on a plein d’autres sujets de conversation, c’est naturel, on parle aussi bien évidemment d’autres choses !
Cela me fait penser à l’entreprise Deliciously Ella d’Ella et Matthew Mills* ! Ça a l’air de fonctionner aussi bien qu’eux. Où êtes-vous basés aujourd’hui ?
On a décidé de mettre l’entrepôt à Bruxelles, parce que notre réseau est là-bas – j’en suis originaire – donc c’était facile. Cependant, on a très vite fait 50% des ventes en France, donc on a un bureau à Paris et un à Bruxelles, donc c’est franco-belge.
*Pour en savoir plus sur Deliciously Ella : https://deliciouslyella.com
Peux-tu nous expliquer le principe de Kazidomi plus en détail ?
Pour continuer ma petite histoire, au tout début, c’était axé médical. J’allais voir les médecins pour qu’ils recommandent la plateforme, et là il y a eu un gros changement. Je me suis dit que si les gens pensaient qu’il fallait avoir un problème pour aller sur le site, ça ne pouvait pas aller. J’avais un souci de communication, donc au bout de 4 mois, je suis complètement repartie à zéro. On a changé la communication et fait en sorte que ça devienne gourmand, sympa, naturel, et pas synonyme de restriction. On avait 300 références uniquement dans l’alimentaire, et on a étendu notre gamme à 3000, aux cosmétiques, aux compléments, et on peut autant retrouver son dentifrice, que sa plaquette de chocolat, ses pâtes, ta boite à tartines sans BPA. C’est donc très varié. Tu peux avoir les mêmes produits mais si ta communication n’est pas bonne, elle n’est pas bonne. C’était une vraie leçon. C’est important d’avoir un axe clair de marketing et de communication, ça ne se fait pas n’importe comment.
Nos ventes ont alors commencé à bien prendre, en essayant de toucher un public plus âgé pour l’achat en ligne, en ouvrant les canaux, en communicant sur le « healthy sexy » mais après quelques mois, on a rencontré un nouveau problème : la barrière du prix. Beaucoup de personnes disaient que c’était cher. Le fait est que le bio est un peu plus cher que les produits de supermarché classiques. En réfléchissant sur ce point, on s’est rendu compte qu’on avait toute une tranche de clients plus âgés qui achetaient régulièrement, mais les jeunes c’était du « one shot », qui dépensaient une fois puis après plus rien. Ce système n’était pas rentable, donc on a mis en place un système d’abonnement qui est une carte de fidélité qui coûte 100€ par an, qui donne accès à des réductions de 20 à 50% et ça a complètement changé le business model. Au lieu de prendre une marge comme le font les retailers, on se rémunère sur la carte fidélité. Ça a eu pour effet de faire en sorte que tous les paniers d’achats montent, tous les jeunes ont doublé ou triplé la quantité ! Cela a permis de rendre viable le projet. Dans le e-commerce, il y a énormément de boîtes qui se plantent très rapidement, parce que c’est couteux en marketing, et les clients sont peu fidèles derrière. Chez nous, comme il y a un investissement de départ, les gens ont envie de rentabiliser. On a créé une communauté – sans vraiment se dire qu’on allait faire ça – qui est devenue ultra active, qui recommande tout le temps des produits, propose des améliorations sur le site, etc. Comme ils ont des réductions, que le prix de l’abonnement reste le même et qu’on offre un parcours utilisateur super fluide sur le site, ils ont envie que ça continue à fonctionner.
C’était difficile d’arriver à les convertir au départ ?
Non, ce n’était pas trop difficile. 85% le prennent, ce n’est pas obligatoire. Mais comme on indique partout sur le site les économies qui sont faites avec l’abonnement, c’est facile de calculer si c’est rentable pour le client, et c’est le cas au bout de 3-4 commandes, ça va vite.
Tu vis de cette activité ?
Oui, je suis à plein temps dessus et on est une bonne petite équipe maintenant, on est presque 25, une petite famille, répartie entre Bruxelles et Paris.
Quel est ton rôle exactement aujourd’hui ?
Ça a pas mal évolué. Au début, j’étais très fort dans l’opérationnel. L’équipe est petite donc je faisais beaucoup de choses moi-même, mais mon rôle a évolué vers celui de manager.
Au début, j’étais entrepreneure, donc tu mets les mains dans le cambouis, et puis ta boîte grandit et tu te rends compte que tu dois manager tous ces gens, être sûre qu’ils bossent sur les bonnes choses, qu’ils soient motivés, rémunérés de manière juste, qu’ils progressent, et je ne m’y attendais pas du tout.
J’étais étudiante quand j’ai démarré cette aventure, je n’avais eu aucune autre expérience, et en fait quand tu embauches des gens, ceux-ci attendent les directives donc mon rôle a beaucoup évolué. Je dirais que 70% de mon temps, c’est manager. Il y a 10% de relations publiques, pour donner des conférences, rencontrer les journalistes – j’ai de la chance d’être une femme jeune donc pas mal de gens me sollicitent, pour parler et partager mon expérience. C’est important pour nous de raconter cette aventure. Les 20% restant sont dédiés à améliorer les processus car certaines choses ne fonctionnent pas de la même manière en fonction de la taille de l’entreprise, notamment la logistique. Tout doit être informatisé, donc j’essaye de bosser sur l’amélioration IT, tout en engageant de plus en plus de personnes spécialisées pour mettre en place des solutions.
En tout cas, c’est chouette car ça évolue tout le temps ! Mon rôle n’était pas le même il y a six mois, et je ne sais pas ce qu’il sera dans les 6 prochains ! Je pense que ça va être encore plus de management, parce que quand on grandit, ça change complètement les tâches et la manière de concevoir le rôle de dirigeante.
Tu avais fait des stages en entreprise auparavant ?
Cela n’est pas obligatoire en Belgique donc j’avais fait un stage en été, ce qui a confirmé que je ne voulais pas du tout me retrouver dans une grosse boîte. Je trouvais ça abrutissant, un manager qui te demande une tâche, et de bosser avec quelqu’un d’autre qui te donne des ordres… Je me suis dit que je ne voulais pas finir comme ça, à faire des choses qui ne me passionnent pas, en lesquelles je ne crois pas, à être à la merci de quelqu’un. Il faut dire que c’était une grosse entreprise, les choses peuvent se passer différemment en startup.
Aujourd’hui, chez Kazidomi, chacun a son mot à dire et si quelqu’un n’est pas d’accord avec moi, il peut le dire ; le peu de hiérarchie le permet. On bosse tous dans le même espace, ce n’est pas parce que ça vient du haut qu’on n’en discute pas.
Du coup, c’était évident pour toi dès 12 ans que tu serais entrepreneure ?
Oui ! Il faut dire que j’ai une grande chance aussi car il n’y a que des indépendants dans ma famille !
Mes parents sont médecins, mon oncle a bien réussi, ma tante a lancé sa boîte et l’a revendue… Ce n’était pas tabou de dire « je ne vais pas dans une boîte et je me lance ». Je sais que ce n’est pas comme ça dans toutes les familles, j’ai eu la chance que mes parents soient compréhensifs, car eux-mêmes avaient été encouragés. On a ce mindset entrepreneurial, ce qui n’était pas du tout le cas d’Alain, mon compagnon et associé. Ses parents trouvaient que c’était risqué, qu’il n’y avait pas de sécurité. Il n’était pas heureux dans son job et pour lui c’était frustrant mais c’était plus dur de dire à ses parents qu’il allait démissionner. C’était difficile au début car quand tu lances un projet, tu es à 2000% en permanence et tu as besoin d’encouragement, d’ondes positives… si tu as des gens qui te découragent, c’est plus dur que dans une boîte normale. Le conseil que je donne aux gens qui démarrent leur boîte c’est « entourez-vous des bonnes personnes, vous aurez besoin d’énergie ». Je me souviens au début de Kazidomi, il y avait des gens qui me disaient « alors combien tu as vendu de granolas cette semaine ? » en se marrant, et tu te dis juste ce ne sont pas des gens qui te font du bien alors que tu as des personnes qui ne sont pas de bons amis et pourtant qui passent commande, qui t’encouragent et ça, ça fait vraiment du bien.
Est-ce que tu as eu des moments de doute quand tu as lancé Kazidomi ?
J’ai eu des moments de doute, mais je ne me suis jamais dit que j’allais abandonner. C’est justement grâce aux gens qui me soutenaient, on m’a toujours encouragée à continuer. Le début était dur, tu n’en peux plus, tu as bossé comme une malade, tu n’as pas de ventes et tu as envie d’éclater en sanglots… Tout le monde pense qu’au début la vie est rose pour les entrepreneurs, on en parle de manière positive, mais ça n’existe pas les histoires où du jour au lendemain c’est le paradis sur terre. Donc je me demandais plutôt si je faisais ce qu’il fallait, s’il ne fallait pas pivoter, ce que j’ai fait. J’allais voir les médecins et j’attendais deux heures dans la salle d’attente, donc à la fin de la journée, tu as l’impression de n’avoir rien fait, le médecin ne t’a pas du tout écoutée, tu te demandes si tu fais le meilleur… donc c’était plus des moments de remise en question par rapport au concept.
Alain me motivait, me disait de rester forte. J’appelais aussi mon père, qui me soutenait. Aujourd’hui, je me dis que j’ai eu de la chance. Ce n’est pas juste le talent, c’est la chance d’avoir les gens que j’avais pour m’entourer.
Tu as eu recours à des investisseurs pour te lancer ?
Au tout début, j’avais créé une SARL (société à responsabilités limitées), et le capital était de 6000€. Ce n’est pas énorme mais j’avais fait des économies avant et ça m’a permis de tenir six bons mois. J’avais acheté mes produits, je faisais beaucoup de choses moi-même, et je ne dépensais pas des milliers d’euros pour une cover sur un magazine ou pour des campagnes ads – j’étais très attentive aux dépenses. Cela m’a permis de tester le concept, c’est bien de ne pas commencer avec trop d’argent au début. Parfois certaines startups lèvent des fonds d’un coup, mais pour moi la réussite n’est pas de lever 2 millions d’euros en démarrant, c’est avoir une boîte stable et un business model viable. Les médias déséquilibrent un peu cela et les gens ont une vision biaisée de l’entrepreneuriat. J’ai donc commencé avec peu de fonds, et au bout de 8 mois j’avais mis en place l’abonnement, et je commençais à avoir de la croissance, alors j’ai été voir un business angel qui a investi 50 000 euros. Je l’ai rencontré via ma famille et des entrepreneurs. C’était risqué pour cette personne car cela faisait 1 mois que je montrais la croissance mais on faisait 6000€ de chiffre d’affaires par mois, c’était minuscule. Il a quand même fait le pari et avec ces 50K€ – ce qui n’était pas énorme – j’ai embauché deux personnes en marketing et produit. L’équipe a ainsi commencé à se constituer et j’ai commencé à investir plus en marketing. Mais 50 000 euros, c’est vite parti si tu ne réfléchis pas bien. Donc j’ai tenu un an, et ensuite j’ai eu accès à un emprunt. Comme on avait du stock, ça se finançait facilement. Et puis j’ai rencontré les 4 investisseurs que j’ai aujourd’hui – qui sont des entrepreneurs qui ont tous galéré au début, donc ils savent tout ce que c’est. Eux ont investi 350K€ une première fois et en mars 2019 de nouveau 400K€. Cela nous a permis de passer à 25 personnes, de déménager dans un entrepôt de 2000m2, de tripler la surface, le catalogue, de passer à plus de références, de développer la marque propre. Cela s’est fait de manière incrémentale, et ce qui est cool c’est comme on a augmenté la valorisation de la société, on est actionnaires majoritaires. On a encore envie de se donner à 2000%, même si ça reste risqué.
Entre le moment où tu as lancé Kazidomi et aujourd’hui, est-ce que tu vois d’autres leçons ou conséquences que tu as apprises ?
La plus grosse leçon concerne l’humain, c’est important d’embaucher les bonnes personnes, parce qu’au début tu as peu d’argent, et tu n’oses pas embaucher des bons profils, des talents ; tu prends des gens qui coûtent moins cher et en fait et ça peut freiner ton développement. Parfois, ça coûte moins cher d’embaucher quelqu’un talentueux, que quelqu’un qui n’est pas compétent avec qui il va y avoir des erreurs. Tu dois créer une équipe, il te faut des personnes qui ont la niaque, pas des gens qui sont là pour faire et partir juste après. Au début, on a fait ça, on a engagé des personnes avec qui on n’avait pas forcément le meilleur « fit », qui n’avaient pas les compétences, et petit à petit on corrige. On adapte en formant les profils, soit en prenant des managers compétents, soit la personne va s’en aller d’elle-même car elle ne se sent pas investie. Ensuite, j’ai appris une leçon liée aux dépenses marketing. On aurait pu aller encore plus vite, mais on était trop figés sur nos dépenses. Comme on avait peu d’argent, on se demandait si c’était la peine d’investir 5€ dans des campagnes. Ça ne paraît rien comme ça mais chaque euro comptait. Dès qu’un euro sortait, j’avais l’impression de le sortir de ma poche. Donc on y a été progressivement. Je pense qu’on aurait pu trouver un meilleur entre-deux.
Est-ce qu’il y a des choses que tu aurais aimé faire différemment ?
Honnêtement, non. J’aurai cependant voulu avoir les compétences parfois humaines de management, parce que je n’avais pas les compétences pour gérer tout ça. Tu peux entendre une personne faire un speech ou t’en inspirer, lire des bouquins etc. mais le management c’est sur le terrain, et j’étais seule, personne n’était au-dessus pour me donner des conseils, pour me dire de parler d’une certaine façon, me dire que quelque chose n’était pas adapté, etc. Et le fait qu’Alain vienne m’a beaucoup aidée, car il est venu avec une structure RH, et il a mis en place le feedback de choses formelles. Il avait eu des managers aussi, et savait parfois résoudre calmement des enjeux là où j’étais parfois sanguine. J’étais un peu trop directe et le fait de l’avoir vu gérer les problèmes différemment m’a aidée.
Quels sont les avantages à être indépendante pour toi ?
Je dirais, c’est vraiment faire ce dont tu as envie, et j’ai envie d’aller au bureau et travailler. Je travaille pour moi et c’est très dur en tant qu’employé de te lever et te dire « wow je suis content, je vais défoncer les résultats, contribuer à la croissance »… La plupart des gens me disent qu’ils soient à leur poste ou pas, ça ne changera pas grand-chose. Peu de gens dans mon entourage et dans les grosses boites se sentent indispensables, moi je me sens indispensable chaque jour. Si je ne suis pas là une semaine, ça s’effondre, et tu te rends compte que ton équipe a besoin de toi, que tu délivres de la valeur, je me dis wow 25 personnes travaillent dans mon entreprise, dont des parents qui nourrissent leurs enfants grâce à l’activité qu’on a créée, et moi ça me donne une énergie de malade. Je me lève et j’ai envie de mettre plein de trucs en place. Un des défauts de ça, c’est que j’ai du mal à partir en vacances en déconnectant, j’ai envie de voir comment ça se passe, de connaître les chiffres. Aujourd’hui, Alain et moi restons de gros moteurs dans l’entreprise. Les managers jouent de mieux en mieux leur rôle mais quand on est là il y a une vitesse en plus.
Je dois cependant ajouter que je suis vraiment touchée quand je vois parfois certains de mes employés vraiment impliqués dans l’entreprise, qui s’investissent pleinement pour faire avancer le business, c’est un vrai plaisir de travailler avec des personnes comme ça.
Tu disais donc que tu déconnectais peu, mais profites-tu quand même d’une certaine flexibilité ?
Oui, je fais ce que je veux globalement. Cela dit, je suis beaucoup au bureau et j’ai peu de temps libre, mais si je veux bosser de chez moi, venir à Paris, partir deux heures dans la journée, je le fais. En revanche, ça ne m’arrive pas souvent de me dire que je vais aller au sport ou déjeuner avec des copines. Je ne le fais pas parce que j’ai envie de travailler. Donc ça me donne de la flexibilité, je ne demande pas mes vacances, je les prends, si je veux bosser un samedi, je le fais. Je suis maître de mon agenda et je ne demande rien à personne.
Ton temps libre tourne autour du travail, mais est-ce que tu prends soin de toi ?
Ça oui, parce que je l’ai toujours fait. Je ne me suis jamais forcée, je n’avais jamais de sucrerie chez moi, pas de Nutella ou des produits comme ça, l’alimentation a toujours été vraiment saine chez moi. Je fais vraiment attention, je me complémente aussi, car j’ai des carences. J’ai une vie plus stressante donc je prends du magnésium et je fais du sport régulièrement. Je cours beaucoup pour pas être enfermée : je pars, je cours et ça permet de réfléchir seul avec soi-même, contrairement à d’autres sports où tu n’as pas le temps de réfléchir, de te remettre en question. Sinon je joue dans une équipe de hockey depuis toute petite. Je vais devoir arrêter malheureusement car tu dépends d’une équipe et tu dois être présent.e aux matchs, aux entraînements, et là ce n’est plus possible. Sinon je vais de temps en temps à la salle avec Alain faire des abdos, des haltères, etc. Et je lis beaucoup c’est ma principale source d’inspiration. Dans les livres, tu vois comment untel traite ses employés, ce sont souvent des lectures business dont je me sers après dans l’entreprise.
Est-ce que tu veilles au bien-être de tes employés ?
Oui on a mis en place un « team barometer », du mindset de leur bonheur. On remplit des formulaires et les résultats sont traités de façon anonyme. Tu vois vite s’ils se sentent bien, s’ils grandissent, et on en discute ouvertement. On prend ensuite des solutions ensemble. En ce moment, on a des fruits toutes les semaines au bureau, on organise un team building, un restaurant, une activité sportive, un dîner… Les gens se plaignaient que les choses soient organisées à la dernière minute et que tout le monde ne puisse pas être présent alors maintenant on s’organise plus en amont. On nous avait aussi dit qu’il n’y avait pas d’endroit cosy où faire une pause alors on a mis cela en place également. On essaie de donner la parole aux employés, et comme c’est anonyme les gens se sentent plus libres. C’est Alain qui a amené cela, grâce à son expérience dans des plus grosses structures.
Quels conseils donnerais-tu à un jeune entrepreneur ?
Je lui dirais de se lancer ! J’entends beaucoup de gens se remettre en question, passer des mois à faire des études de marché, mais à un moment il faut y aller ! Ce qui m’a fait franchir le cap, c’était la constitution légale de la société. J’ai mis 6000€ sur le compte et là ce n’était plus de la rigolade. Ça a été le déclic et j’y suis allée à fond !
Toi qui t’es lancée jeune, comment vois-tu évoluer le rapport au travail ?
Je ne sais pas si de plus en plus de gens vont suivre ce parcours parce que ça reste beaucoup de responsabilités. Tout le monde n’a pas envie de ce rythme. Moi, ça me va, j’adore et je suis passionnée. J’ai grandi là-dedans, j’ai créé mon job de rêve mais ça ne correspond pas à tous. Quand j’en discute avec les employés, ils se demandent parfois comment je fais. Mais les gens ont de plus en plus besoin de sens ; avant on ne parlait pas trop, on n’avait pas les réseaux pour se plaindre et les gens restaient dans une boîte pendant 20 ans, c’était mal vu de changer au bout de deux ans, aujourd’hui c’est presque normal. Je me souviens des premiers CV que je recevais, je voyais des personnes qui avaient travaillé 4 ans dans une boîte, ça m’inspirait confiance, et aujourd’hui tous les CV que je vois, ce sont des personnes qui changent tous les ans ! En les rencontrant, j’entends ce qu’ils me disent, qu’ils étaient comme des robots, que personne ne les considérait. Ils ont besoin de donner du sens à ce qu’ils font et d’avoir de l’impact, de comprendre leur contribution dans leur entreprise. Dans les grosses boîtes, c’est ultra hiérarchique, mais chez nous tout le monde a de l’impact. Quand tu veux une réponse, tout le monde est dans la pièce, tu l’as rapidement et tu avances, j’espère que ça va rester comme ça, car tout le monde a tellement d’impact que les gens sont indispensables, si un part il faudra le remplacer.
Pour terminer, que penses-tu de la tendance du bien-être et bien-être au travail ?
C’est génial, de plus en plus d’entreprises le considèrent. C’est beaucoup lié au fait que les gens partent car ils se sentent comme des pions. Les choses changent beaucoup quand ils sentent qu’on s’occupe d’eux. Ma tante a fait un burnout en gérant son entreprise, elle a donné beaucoup de conférences, elle écrit des livres, sur comment éviter le burnout, et tu sens que les entreprises veulent investir dans ce sujet. Elle voulait juste partager son expérience, pour aider les gens à s’en sortir, car ce n’est pas si facile, et plein de boîtes sont venues vers elle pour éviter cela. Les entreprises veulent prendre soin de leurs employés, de l’environnement de travail, des espaces, investir dans la décoration. Elles comprennent l’importance de se sentir bien sur son lieu de travail. Et ce qui est lié à l’alimentation et au sport je trouve que c’est super. Je connais une start-up, BSit (c’est une appli qui met en relations baby-sitters et parents), dont les employés ont un abonnement à une salle de sport. Personne n’y pensait avant ! C’est un argument attractif, le fondateur accorde de l’importance à ce que les employés fassent autre chose en dehors du travail et je trouve cela super !
Merci Emna !
Pour aller faire un tour sur Kazidomi, c’est par ici : https://www.kazidomi.com/fr
Et le monde étant petit, vous pourrez d’ailleurs retrouver les produits de Fleur Phelipeau, dont l’interview se trouve ici, sur le site de Kazidomi !